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Un Psy dans la ville
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Fatigue

Nous sommes fatigués, nous sommes débordés, dépassés, exténués… Et pourtant, nous sommes actifs, nous faisons du sport, courons, nageons, sautons, nous surveillons notre alimentation, notre sommeil, avalons des compléments nutritifs, pratiquons les arts martiaux, le yoga et la méditation. Et nous sommes encore fatigués !

Mais que nous arrive-t-il donc ?

Sommes-nous seuls responsables de cet abattement ? car, enfin, avec toute l’énergie déployée pour le combattre, comment se fait-il qu’il ne fasse que croitre, et non se dissoudre ? Peut être déployons-nous trop d’énergie à répondre aux injonctions d’activités venant de toutes parts et à combattre les signes du temps.

Mais la fatigue à la fois physique et psychique qui se déploie chez nous-mêmes et nos contemporains serait bel et bien aussi un fait collectif et sociétal. A force de faire endosser la responsabilité de son bien-être au seul individu, dans une logique capitaliste et libérale, ce dernier craque de toutes parts. Progressivement écarté du collectif dans sa vie professionnelle, dans la désertion des engagements associatifs et politiques, dans la nucléarisation de la vie familiale et le développement de la vie virtuelle en réseaux sociaux, l’individu porte de plus en plus à lui seul l’obligation du bonheur et c’est cela qui le fatigue. La bonne santé contribue à la sensation de bien-être, de bonheur, mais le bonheur se trouve aussi dans les liens aux autres, dans les aventures collectives, les défis relevés à plusieurs, les projets…

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Pulsion

L’essence de la vie est sensible, nos organismes vivants ont la faculté d’éprouver du plaisir et de la peine, de percevoir des sensations d’origines et de natures diverses, disposition sur laquelle les philosophes s’interrogent depuis des siècles. Mais si l’humain est vivant, tout ce qui est vivant n’est pas systématiquement humain. Quelque chose d’autre vient spécifier l’humain dans le règne du vivant, et ce quelque chose, selon la psychanalyse, pourrait être la pulsion.

Aucune loi scientifique, qu’elle soit biologique, physiologique, ou mathématique ne saura jamais rendre compte de l’intégralité de la vie humaine. A l’instar du cardinal Bellarmin qui, instruisant le procès de Galilée, admet l’héliocentrisme comme hypothèse et non comme vérité, la sagesse est de laisser place à l’immanence et au doute.

Expliquer la pulsion du point de vue de la science « dure » ne modifierait en rien la pertinence du modèle psychanalytique pour comprendre à la fois ce qu’elle est et comment elle agit, car la pulsion a trait à l’essence de l’humain, et aucune science dite dure ne peut prétendre déterminer ou modifier cette nature même de l’humain, à savoir un être qui a conscience de lui-même et qui est doté de la parole.

Mais entrons plus avant dans la description que la psychanalyse fait de la pulsion.

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No future

Un personnage de roman à l’unisson du désenchantement social, c’est ainsi que se présente le héros de « Sérotonine »[1], le dernier livre de Michel Houellebecq. Portrait d’un homme désabusé, désespéré, nostalgique des amours perdus, aux prises avec un avenir barré, ce faux héros ferait la synthèse de l’homo capitaliste du début du XXI° siècle : angoissé et déprimé de vivre dans un monde d’incertitudes. Car l’environnement qu’il décrit est aussi désenchanteur et désenchanté que lui-même : monde d’inquiétudes et d’angoisses sociales, économiques, politiques, replié sur lui même et haineux. Les colères ne semblent plus pouvoir le sauver.

Seule la vie amoureuse apporterait de la joie à cette vie sans saveur, mais pour celui-là qui nous est conté tout est définitivement trop tard.

De cette peinture d’une époque, d’une société inquiète et désenchantée, le lecteur en reconnaîtra la familiarité : c’est sans doute cela qui dérange dans les romans de Houellebecq, cette manière trop précise, trop crue, de nous narrer notre environnement. Nous pourrions oublier trop vite que la littérature n’engage que son auteur. Le personnage et son cadre ne sont que pure fiction, mais comme toute fiction elle puise ses sources dans le réel.

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Ce qui fait vérité

La vérité : y croit-on au nom de l’objectivité des faits, ou au nom de ses propres représentations du monde ? Car la vérité, concept impalpable, voire insaisissable, chacun s’en saisit pour lui donner sa propre définition.

L’être humain est à la recherche de preuves pour étayer sa conception de la vérité, et se rassembler avec ses semblables autour de visions, de pensées, de façons d’être, communes. L’imprécision, l’ignorance, le flou, nous inquiètent : nous les combattons et bien souvent, nous nous opposons au nom de vérités subjectives. La science nous permettrait de nous accorder autour de vérités objectives, cependant ces vérités-là, démontrées par la science, sont parfois mises en doute.

L’observation, que ce soit à partir de l’expérimentation, ou de la situation in vivo, est la méthode scientifique par excellence.

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Questions sur le féminin

« Le féminin toujours en question » écrivions-nous il y a quelques semaines. Le féminin questionné fait le sujet d’une pièce de théâtre[1], écrite en 1870 par Villiers de l’Isle Adam, et jouée ce printemps sur une scène parisienne.Questions sur le féminin

Elisabeth, jeune femme bourgeoise, assiste efficacement son mari dans la gestion de ses affaires et de sa fortune, manifestement plus intelligente et douée que lui. Un soir, après avoir mis de l’ordre dans les comptes, elle lui annonce qu’elle s’en va. Elle veut vivre autrement, elle veut avoir du temps pour rêver, pour contempler, et sans doute aussi pour penser. Ainsi par sa révolte contre l’ordre bourgeois, masculin, capitaliste et consumériste, elle ouvre l’espace de l’intime, de l’idéal, du combat pour vivre par soi-même, exister comme sujet.

Cette héroïne n’est pas sans rappeler quelques autres,

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Temps psychique et temps légal

L’actualité met de nouveau en lumière la problématique question de la pédophilie dans l’Eglise.

Pédophilie dans l’église

Elle est problématique sous bien des aspects : pour l’Eglise comme institution religieuse mais aussi parce qu’elle met les victimes de ces actes destructeurs face à une réalité insupportable : la prescription.
Qu’est ce que la prescription : une mesure d’ordre social qui consiste à décider que les actes délictueux ou criminels ne seront plus poursuivis au-delà d’un certain temps et en l’absence de plainte de la victime. Mesure d’ordre social car la société considère que le temps qui passe sans action de la victime justifie que la sanction ne soit plus justifiée.
Seuls les crimes commis contre l’humanité sont considérés comme imprescriptibles en raison de leur gravité et de la nécessité de les sanctionner quelque soit le temps passé. L’horreur est éternelle.
Ne pourrait on pas penser les crimes de pédophilie comme des crimes contre l’humanité ?

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Démesure

Les hasards d’un voyage aux confins de l’Arabie m’ont donné l’occasion de faire escale à Dubaï et d’une brève, mais néanmoins intense, visite de cette métropole qui présente tous les signes de la démesure. Il n’en fallait pas moins pour interpeller la psychanalyste qui s’assoupissait au sein de la voyageuse.

Démesure – © MPSD

Dubaï, destination de rêve pour certains, vaste terrain de commerce et d’affaires pour d’autres, incrédulité pour le psy qui ne peut s’empêcher de s’interroger sur le sens de ce Disneyland gigantesque, et sur l’âme de ceux qui l’habitent.

Ce royaume du paraître et du consommable, véritable temple dédié au narcissisme de masse, serait conçu pour le bonheur, la satisfaction de tous les manques. Ici, dans des centres commerciaux géants où sont réunies toutes les marques du monde, tout peut être acheté, consommé.

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L’humanité du deuil

Un deuil c’est douloureux ! Oui bien sûr… Comment pourrait-il en être autrement ? Comment ne pas avoir mal lorsque quelqu’un qu’on aimait meurt ? Cet éprouvé douloureux qu’une personne ressent lorsqu’un de ses proches disparaît est avant tout « un savoir humain ». Etre endeuillé, et en souffrir, est le propre de l’homme.

Tenues de deuil – Belle époque

Freud nous rappelle, dans son article Deuil et mélancolie, que « le deuil est régulièrement la réaction à la perte d’une personne aimée…». En ce sens il n’est pas une maladie et nous savons bien qu’il sera surmonté après un laps de temps, qu’il est même nuisible de le perturber. Or, même si nous en connaissons les codes, le deuil ne peut manquer d’être inquiétant tant il présente des aspects sombres qui ressemblent à ceux de la mélancolie. La mort d’un proche, ou la perte de quelque chose d’important,

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La condition de sujet

La cure psychanalytique est une expérience de la parole, un lieu et un temps au cours desquels une personne vient mettre des mots sur ce qu’elle vit, mettre en mots ce qu’elle ressent. Ces mots tissent son histoire, lui permettent de se l’entendre dire, la comprendre… Et par cette expérience unique se reconnaît en celui qui parle, celui qui peut dire JE, le sujet. Elle en constitue sa singularité.

dire – © Ben

Celui, ou celle, qui a fait l’apprentissage de ce dire à la première personne, de sa parole singulière, saura penser les expériences de sa vie selon lui-même, trouver des réponses qui lui conviennent, appréhender des situations nouvelles sans crainte. Il aura accès à sa manière propre d’utiliser le langage.

Ce qui nous sert à dire les choses c’est le langage. Il est d’une certaine façon au service de notre parole, au service de notre pensée. Mais que se passe-t-il lorsque le langage prend le dessus,

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Vous avez dit victime ?

vous avez dit victime ?

Depuis son émergence, dans les années 1990/2000, le terme de pervers narcissique fait florès. Il est entré dans le langage courant, à tel point que cette épidémie est suspecte. Notre société ultra libérale et individualiste se caractérise par une inflation des pathologies narcissiques. Nous sommes passés d’un légitime souci de soi à une obsession de soi.

Le pervers narcissique est le nom du sujet contemporain obsédé de lui-même et pour qui l’autre n’est qu’un moyen pour arriver à une satisfaction de toute-puissance. Cette obsession narcissique se traduit par une objectivation de l’autre, une déshumanisation des liens. Il faut bien convenir que le contexte sociétal l’y invite. La mise en concurrence qui commence dès l’école pour certains, qui se poursuit dans le cadre de la recherche d’un emploi, qui persiste dans le monde du travail a des effets féroces sur le narcissisme de chacun. Non qu’il se renforce, tout au contraire : à force d’obsessions, de contraintes imposées sur le corps, l’esprit, le narcissisme se fragilise car jamais le sujet ne se sent à la hauteur de ce qu’il lui est imposé. Ce n’est plus un hyper narcissique mais un « hypo »narcissique.

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