La vie, après…
Nous avions perdu la mémoire de la peste et du choléra. Dans l’intimité de nos corps, celle-ci vient de se rappeler à nous, venue du fond des âges, d’un passé que nous avions cru révolu à jamais. La pandémie nous rappelle que l’humanité n’est sans doute pas éternelle et que son occupation de la planète Terre est temporaire. Nous avons été pris dans une forme d’
hallucination collective négative qui nous a fait oublier le caractère mortel et transitoire de notre condition humaine. Si ce virus est capable de nous faire recouvrer cette mémoire, alors son passage aura des effets puissants, en particulier celui de nous rendre à l’humilité, et à l’humanité.
L’humanité est aux prises avec le vivant, non pas en guerre, mais en lutte pour sa survie. Ce qui est mobilisé dans ce combat est la pulsion de vie, celle que Freud a nommée en premier comme pulsion d’auto-conservation (de l’espèce humaine). L’angoisse devant la pandémie n’est ni plus ni moins qu’une angoisse devant le risque de disparition de notre espèce. Il ne fait plus de doute qu’elle est menacée durablement et gravement par les effets délétères des dégradations de l’environnement. Il y a à cet endroit-là un formidable déni.
Comment en effet penser que nous serions responsables collectivement de notre propre disparition, si ce n’est en convoquant une nouvelle fois ce que la psychanalyse, avec Freud, a conceptualisé sous le terme de pulsion de mort.