Ouf !!!
Pas si fou, ce pays : le danger immédiat qui menaçait notre démocratie a été écarté. Mais après le soulagement, l’inquiétude persiste.
Que n’avons-nous pas entendu, ni retenu, de la souffrance de ceux qui se sont dit près à « renverser la table », restant sourds à tout argument pragmatique et raisonné ? Qu’avons nous compris de cette violence qui passe les digues du refoulement, dans les paroles, et parfois dans les actes ?
Cet épisode de notre vie démocratique n’est pas sans évoquer le mouvement des « gilets jaunes », dans sa mise en scène de la violence et de la détresse.
Que n’entendons nous pas ?
Une souffrance individuelle qui se noue à celle d’autres ; le sentiment d’insécurité, d’invisibilité, d’être sans voix ; l’impression de ne compter pour rien dans un monde complexe qui échappe aux individus, alors qu’il prône l’individualisme. Et aussi, toujours manquer d’argent pour entrer dans la ronde de la consommation effrénée, avancée comme le seul horizon enviable et émancipateur.
Les réponses à ces souffrances et ces doléances ne sauraient rester sur le seul plan matériel et pécuniaire. Ce dont nous avons besoin, collectivement, c’est de plus de lien entre nous. Ce dont nous avons besoin, c’est de reconstruire la solidarité entre tous, apprendre ensemble à inventer comment vivre dans le monde dégradé qui est notre présent. Pour cesser de se perdre dans une vision dystopique, sans aucun moyen d’agir, un nouveau récit est à réécrire ensemble, un peu à l’instar de ces cahiers de doléances ouverts après la révolution française, mais aussi après la « crise des gilets jaunes ». Ouvrons d’autres cahiers, sortons les anciens de leurs placards, reprenons le chemin des café collectifs, des lieux de solidarité, et parlons-nous.
Cette élection montre que la victoire de Thanatos n’est pas certaine, qu’une grande partie du monde est mue par Eros, pulsion de vie et d’espoir…
Béatrice Dulck et Marie-pierre Sicard Devillard


Les votants du RN sont pour beaucoup des nostalgiques du « pays de leur enfance », ce que des radios trottoirs font entendre : « c’était mieux avant ; c’était mieux quand j’étais plus jeune, il y avait une autorité, du respect… » Ceux que l’on entend ainsi n’ont pas 80 ans mais plutôt 50 ou peut-être 60 ans. Quand ils avaient 20 ans, nous étions en 1980 ou 1990. C’est-à-dire avant les différents chocs de civilisation : l’effondrement des tours jumelles, l’accélération de la mondialisation économies, l’avènement du capitalisme ultra libéral, l’arrivée du numérique et des réseaux sociaux…



Toutes les idéologies fanatiques ont pour trait commun la déshumanisation de leurs victimes mais aussi des sujets fanatiques eux-mêmes. Tout le travail de civilisation, qui avait contenu une telle pulsion de destruction de soi et des autres, se trouve mis en échec… Alors on ne peut que se demander quelles seraient les causes de cet échec et sur quel terreau ces idéologies prospèrent ?
Ce qui nous apparait c’est la finitude de la vie terrestre, ce que les astrophysiciens savent parfaitement : la Terre n’est qu’une planète dont la durée, tout comme celle de la vie humaine, est comptée. Nous avions oublié cette évidence, voire carrément omis, et avons précipité non la fin de la Terre en tant que planète mais la fin d’une Terre vivable pour notre humanité.