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Un Psy dans la ville
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Répétition mortifère

L’horreur des exactions commises par des terroristes mus par des idéologies politico-religieuses fanatiques telles que celles prônées par des organisations comme l’état islamique, Al Qaida, mais aussi le Hezbollah ou le Hamas, ne peut que nous plonger dans le désespoir… Les valeurs de l’humanisme issues du siècle des Lumières semblent si ingénues, si naïves lorsque l’on se trouve aux prises avec l’expression de la haine et de la barbarie. Freud, à l’aube de la plus terrible des répétitions mortifères, de l’extermination programmée des juifs, nous a livré des textes pertinents, sur la guerre, et sur le malaise de la civilisation, textes qui nous éclairent encore aujourd’hui.

Toutes les idéologies fanatiques ont pour trait commun la déshumanisation de leurs victimes mais aussi des sujets fanatiques eux-mêmes. Tout le travail de civilisation, qui avait contenu une telle pulsion de destruction de soi et des autres, se trouve mis en échec… Alors on ne peut que se demander quelles seraient les causes de cet échec et sur quel terreau ces idéologies prospèrent ?

Une des causes est sans doute à trouver du côté du capitalisme et de sa fuite en avant vers toujours plus de libéralisme. Car une première déshumanisation débute avec la conception libérale de l’individu. Devenu objet de consommation, marchandise, l’être humain en est arrivé à se trouver de plus en plus seul, dans un système qui a détruit les liens et les solidarités collectives. Les perspectives qui s’offrent à lui sont celles de la consommation d’objets, de biens, de services, dans une logique de compétition et de comparaison, sans limite. Ce règne du toujours plus a pour effet une perte du sens-même de la vie humaine, l’idéologie libérale engendre une vacuité qui renvoie l’individu à un vide sidéral. L’idéologie politique ET religieuse des islamistes, avec ses injonctions pseudo-religieuses, attire certains qui pensent y trouver, si ce n’est un sens à leur vie, du moins une manière de combler le vide de sens par du « en veux-tu, en voilà », comme disait Lacan. Le travail de civilisation s’écroule au profit des mécanismes les plus archaïques, les plus mortifères.

Le monde hyper-individualiste engendré par la société ultra-libérale a de toute évidence mis à mal l’altérité, voire réveillé l’expression de la haine envers l’autre, le voisin, le nebenmensh. Le complexe de Caïn, décrit par Gérard Haddad, ramène à un temps de développement archaïque, en amont du complexe d’Œdipe qui, quant à lui, ouvre l’accès à la reconnaissance de l’autre par le jeu des identifications. La haine de l’autre est première dans le développement psycho-affectif de la vie humaine. L’autre, c’est le rival, l’ennemi à abattre, en même temps que notre semblable, paradoxe qui, dans un mouvement de retournement, rabat la haine sur soi-même. C’est le mouvement libidinal de la pulsion de vie qui permet d’investir soi-même et les autres sans détruire, et de dépasser la haine et la destructivité premières. Ces mouvements mortifères restent cependant en embuscade, pour preuve la recrudescence des guerres, de la barbarie et de la destruction.

Dans cette lutte constante entre éros et thanatos, entre pulsion de vie et pulsion de mort, le pire n’est pas toujours sûr…

Béatrice Dulck et Marie-pierre Sicard Devillard

individualisme, pulsion de mort, pulsions

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