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Un Psy dans la ville
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Culture

Tout ce qui, en matière de culture, littérature, théâtre, cinéma et d’autres sources encore, nourrit notre pensée.

Silence !

La famille est un système dans lequel chacun des parents mais aussi chaque frère et sœur s’inscrit malgré soi, au nom du sang, dans cette appartenance qui nous transcende. Y a-t-il autre chose que l’être humain ne peut choisir que ses parents, sa famille ?  Chaque être nait où il nait, c’est-à-dire toujours au cœur d’un système plus ou moins bien organisé, plus ou moins bien équilibré.  Plus ou moins équilibrant, aussi, selon qui il est.

Ce système préexiste en partie à chaque naissance, mais se construit aussi au cours de l’histoire de chacun et de tous, des joies, des drames et de ce qui en est dit ou pas : une famille a ses anecdotes, ses histoires, ses façons de parler, ses mots et expressions fétiches. images 3Ainsi, le système familial tient par des mots (ceux que l’on dit et ceux que l’on ne dit pas), un lexique et une grammaire propres: une langue. Cette « langue de famille » ordonne les relations des membres entre eux en même temps qu’elle cimente le groupe de ceux qui la composent et lui donne une cohésion. Pour certains, elle est la seule langue qu’ils ne connaitront jamais. D’autres parviennent à en apprendre une autre, tout en se détachant de la première, ce qui peut être un des enjeux d’une psychanalyse.

Dans le roman « Rien ne s’oppose à la nuit », Delphine De Vigan déploie la vie de la mère de l’héroïne, morte par suicide après soixante-deux ans d’une vie instable.

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Migrer … et se perdre

Faille « Nous traverserons ensemble » est un roman documentaire construit sur la forme du polar, du suspens.

Qu’est-ce qui a conduit Zaher jusqu’à l’impasse d’un square parisien, celui où il est mort assassiné ?

Nous voyageons le long des parcours singuliers, devenus hélas tellement banals, de Zaher, Mehdi, Jamal, Ibrahim et quelques autres.

De jeunes hommes fins, sensibles, cultivés, sains d’esprit et en paix avec eux-mêmes avant leur départ.

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Au risque de l’autre

UnknownBénédicte Ombredanne est une prisonnière, sa geôle est un mariage, son gardien un mari. Ainsi nous apparaît l’héroïne du roman d’ Eric Reinhardt « L’amour et les forêts » et cette prisonnière, le lecteur voudrait la voir s’échapper, se faire la belle.

Il y a quelque chose de Proustien dans ce récit d’une femme captive d’un amour impossible. Mais surtout le formidable tableau clinique d’une névrose obsessionnelle.

Car c’est bien de l’obsessionnalité pathologique de son mari dont Bénédicte Ombredanne est prisonnière, et dont la vérité ne lui sera jamais révélée.

On se souviendra du film de Claude Chabrol « L’enfer », qui entretenait constamment le trouble autour de cette frontière ténue entre raison et folie. Là aussi il était question d’un couple qui sombrait du fait de la névrose obsessionnelle du mari. Dans le roman d’Eric Reinhardt les dés sont jetés et la pauvre Bénédicte restera naïve jusqu’au bout. Le lecteur n’a d’autre alternative que de prendre le parti de cette femme victime de son méchant mari.

C’est agaçant.

Car ce serait oublier que le couple est un système qui se fabrique à deux, dont chacun à la responsabilité de ce qu’il en fait, dans la dépendance et l’inter-dépendance qu’il instaure avec son partenaire. Et le couple devient le lieu de tous les dangers, mais aussi de tous les bonheurs.

« La liberté de l’homme se confond avec le développement de sa servitude, écrivait Lacan, et ce, dans le mouvement même qui le mène à une conscience de plus en plus adéquate de lui-même ». La dialectique du rapport à l’autre est la condition même de la vie humaine, sa perte comme sa délivrance. Car c’est de la relation que naît la conscience de soi, le développement, la création de sa propre vie.
Manifestement pour Bénédicte et son mari ça n’a pas fonctionné, mais le lecteur, lui, a la liberté de ne pas s’apitoyer sur le sort réservé à l’héroïne de ce roman.

Marie-pierre Sicard Devillard

Eric Reinhardt – l’amour et les forêts – Gallimard 2014