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Un Psy dans la ville
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dépression

No future

Un personnage de roman à l’unisson du désenchantement social, c’est ainsi que se présente le héros de « Sérotonine »[1], le dernier livre de Michel Houellebecq. Portrait d’un homme désabusé, désespéré, nostalgique des amours perdus, aux prises avec un avenir barré, ce faux héros ferait la synthèse de l’homo capitaliste du début du XXI° siècle : angoissé et déprimé de vivre dans un monde d’incertitudes. Car l’environnement qu’il décrit est aussi désenchanteur et désenchanté que lui-même : monde d’inquiétudes et d’angoisses sociales, économiques, politiques, replié sur lui même et haineux. Les colères ne semblent plus pouvoir le sauver.

Seule la vie amoureuse apporterait de la joie à cette vie sans saveur, mais pour celui-là qui nous est conté tout est définitivement trop tard.

De cette peinture d’une époque, d’une société inquiète et désenchantée, le lecteur en reconnaîtra la familiarité : c’est sans doute cela qui dérange dans les romans de Houellebecq, cette manière trop précise, trop crue, de nous narrer notre environnement. Nous pourrions oublier trop vite que la littérature n’engage que son auteur. Le personnage et son cadre ne sont que pure fiction, mais comme toute fiction elle puise ses sources dans le réel.

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La dépression ou l’écume des vagues

Quand l’idée nous est venue de faire un texte sur la dépression, cela nous avait semblé une bonne idée… las …le stylo m’est tombé des doigts… une envie irrépressible de dormir… ou de faire autre chose ..
Pourtant ni moi ni mes collègues, ne sommes ignorantes de ce que l’on appelle la dépression.. Bien sûr que certains de nos patients présentent des symptômes dépressifs…on peut y retrouver la liste du DSM IV ou V..bien sûr que certains arrivent en ayant en mains une ordonnance de leur généraliste prescrivant des antidépresseurs ..
Alors pourquoi le stylo me tombe des mains…eh bien parce que la dépression comme entité nosographique, ne me dit rien..non que je n’ai rien à faire de ce que mes patients ressentent, bien au contraire..mais si je m’en tiens à cela, je ne leur serais d’aucune utilité…
Résumons : vous n’avez plus envie de rien, vous êtes épuisé, la moindre remarque vous irrite, l’angoisse vous étreint, vous ne dormez plus ou vous dormez trop : bien : vous êtes déprimé.
Vous trouverez toujours de bonnes âmes pour vous convaincre que la vie est belle, que vous avez dans les mains votre destin. Certains plus agressifs vous diront que vous n’avez aucune raison d’être ainsi, vous culpabilisant un peu plus.
Et puis, il y aura vous.. qui sortez de chez votre médecin, il a été attentif à ce que vous lui disiez.. il a hoché la tête plusieurs fois avec compassion, demandant des précisions sur votre appétit, votre sommeil…verdict : « vous faites une dépression, il y a sur le marché de très bons antidépresseurs, vous verrez dans 2 ou 3 semaines, ça ira mieux »
Vous regardez votre main qui tient l’ordonnance, un peu sonné. Vous allez même à la pharmacie et achetez les médicaments…mais vous n’y croyez pas trop…à son « ça ira mieux »
Non, rien ne va en définitive, vous savez, vous sentez que vous êtes à un moment crucial…soit vous prenez ces médicaments, soit vous prenez votre courage à deux mains et vous allez voir ce qui se passe..parce qu’au fond, ce que vous ne lui avez pas dit au médecin..c’est que ce n’est pas la première fois…vous avez déjà traversé ces moments de découragements intenses…bien sûr vous les avez surmontés et la vie a repris son cours..mais quand même, ça revient..plus ou moins fort…vous dépensez une énergie folle pour éloigner ces pensées sans vie…
Là, vous n’en pouvez plus, vous sentez que cette fois, vous ne pourrez pas en faire l’économie…Vous savez, oh très vaguement ou plus exactement vous avez l’intuition que ces signes manifestes de la dépression, ne disent rien de ce qui vous arrive…ils ne sont que l’écume de ces vagues de fond qui vous emmènent au large…
Le traitement de la dépression par une cure analytique, c’est cela…. voire au-delà de l’écume… mettre des mots sur votre intuition… vous entendre les prononcer… et finalement déceler du sens là où il n’y avait que creux ou vide.
Alors les médicaments, pourquoi pas…s’ils n’ont pas pour effet de gommer l’écume et de laisser les vagues de fond..sans écume mais toujours aussi puissantes…
C’est à vous de voir….

Béatrice Dulck

Le nouveau DSM est arrivé

  • Troubles, toc, tag, dépression ça n’existe pas !
  • Comment ça, ça n’existe pas ?
  • Ce n’est pas parce ce que ça vient d’être voté que ça existe. Le nouveau DSM (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) vient d’être élu démocratiquement. Et c’est ainsi que le DSM Nouveau est arrivé !

La dépression, les troubles et autres contrariétés n’y figurent pas, non parce que les psys cloitrés dans leurs hospices, asiles, cabinets et autre lieux d’activité ont observé les tristes, les fous, les taciturnes, les toqués, les tagués etc., mais parce qu’ils ont voté.

Chaque trouble qui figure dans le DSM est adopté par un vote qui tient compte des parts de marché : exploiter et des molécules disponibles dans les labo pharmaceutiques.

La nouvelle sémiologie DSM n’est pas descriptive mais prescriptive, puisqu’il n’y a aucune raison d’introduire troubles, toc et dépression s’il n’y a pas déjà un remède censé les guérir.

Ainsi, la plus petite parcelle de contrariété humaine ouvre au formidable marché des troubles !

Cette nouvelle sémiologie est elle un malentendu ?

Est-elle un produit commercial ? Est-elle l’effet d’une intolérance à l’humain ?

Si le fait d’être sur terre est sans remède, quel effet secondaire y-a-t-il à croire qu’on puisse en fabriquer un ?

Angélique Christaki